Le poids du pouvoir [RP Test - Samael]

Dehors, l’orage faisait rage, la pluie tombait en trombe, le tonnerre faisait trembler le sol alors que les éclairs découpaient sur les murs de la chambre les silhouettes menaçantes des arbres pliés par la force du vent. Dans l’alcôve, au fond de la pièce, deux corps s’enlaçaient, couverts de sueur, leurs soupirs étouffés par la tempête qui se déchaînait à l’extérieur.

Entre les draps de soie ocre, le couple s’unissait avec violence et passion. De l’amour il n’y en avait point... Juste du plaisir, et de la sensualité... Alors qu’à plat ventre, la femme s’agrippait au tissu, étouffait ses cris dans un coussin, elle sursauta, un coup de tonnerre plus puissant que les autres envahissant le cocon de la chambre.

Ralentissant ses coups de rein, Samael repoussa les mèches frisant sur la nuque de son amante, caressant de sa bouche le creux de son épaule, avant de planter ses dents dans sa peau légèrement dorée.

- Quelque chose vous tracasse Baronne ? lui susurra-t-il à l’oreille tout en s’enfonçant en elle avec la plus lente invasion.

La femme laissa échapper un petit hoquet, incapable de répondre à la moindre question, surtout pas quand il la força à se relever, s’agenouillant derrière elle pour appuyer son torse contre son dos. Il glissa une main sur son ventre tendu, descendit plus bas, la caressant avec insistance, alors qu’elle l’observait, le regard trouble, par l’intermédiaire du miroir émaillé qui leur faisait face...

- Votre mari ne saura jamais rien, si c’est ce qui vous inquiète...

Son regard fixé au sien, il la caressa de sa bouche, descendit surs ses épaules, accompagnant ses baisers d’une langue attentive qui dessinait lentement les muscles délicats de son dos.

- Après tout... Il n’y a que vous... et moi... qui sommes au courant.

La femme, une délicieuse créature aux mèches chocolat, s’appuya contre Samael, fermant les yeux, se crispant pour retenir les soupirs qui la tourmentaient. Elle ne répondit rien, suppliciée par le plaisir qui avait pris possession de son corps. Ça n’aurait pas du tout dû se passer comme ça... Elle avait répété avec son mari... Chaque mot, chaque geste... Les sourires... Les rebuffades... Tout avait marché jusqu’au moment où elle avait pénétré son espace privé.

Là elle aurait dû lui demander à boire, et elle aurait versé le poison dans son verre dès qu’il aurait eu le dos tourné. Tout homme civilisé aurait dû proposer un verre de vin à son amante avant de passer à l’acte non ? Lui l’avait simplement attiré dans ses bras avant même qu’elle n’ait pris la parole, et quand elle avait ouvert la bouche pour protester, c’est sa langue qui l’avait pénétrée et lui avait fait perdre la tête.

Le Roi n’était pas un être raffiné, elle l’avait tout de suite compris, quand il lui avait arraché ses vêtements sans autres préliminaires. Elle s’était retrouvée nue comme un ver, la fiole bien loin d’elle, ses mains caressantes parcourant son corps avec plus de dextérité qu’elle ne s’y serait attendue... Les talents du Roi n’étaient pas surestimés, elle avait pu en convenir elle-même...

Son corps tremblait sous ses assauts, tantôt lents, tantôt brusques et secs, et elle finit par gémir franchement, au seuil du plaisir.

Après cette ultime preuve de faiblesse, Samael se sépara d’elle, la retournant face à lui pour plonger son regard dans le sien. Un léger sourire flottait sur ses lèvres alors qu’il glissait lentement ses mains le long des bras fins, les plaquant contre l’oreiller. Sa bouche vint trouver la sienne, caressante, langoureuse. Son estomac se plaqua sur sa poitrine alors qu’il la dominait de tout son corps et de toute sa force, prenant possession d’elle à un rythme soutenu, ses hanches venant à l’encontre des siennes dans une danse envoûtante. Il n’eut même pas besoin de lui demander d’accrocher ses jambes autour de lui... Abandonné à son plaisir, le corps de la jeune baronne se liait à lui sans résistance, alors qu’il les amenait tous deux sur le chemin de la délivrance.

Au summum du plaisir, son corps se raidit brutalement. Il grogna sa jouissance en même temps que le cri d’extase de son amante, avant de retomber sur elle, le souffle court.

Il n’attendit pas une seconde de plus pour se retirer, glissant sur la couche à côté d’elle, se séparant de leur étreinte, une main posée sur son visage, l’autre abandonnée sur le lit entre eux. Oh la jeune femme était une maîtresse passable... Pas vraiment d’originalité, mal à l’aise mais manipulable... Elle n’avait jamais trompé son mari, c’était visible... Et probablement jamais testé rien d’autre que le missionnaire.

Même si Gwynvere ne l’avait pas déjà prévenu de la trahison du Baron Sine Pilas, et du complot qu’il préparait par l’intermédiaire de sa femme, il aurait compris sans peine que Melikha Sine Pilas n’était pas venue à lui dans le même but que toutes les autres femmes. Elle n’en voulait ni à son trône, ni à son titre. Le toucher la terrorisait. Et même s’il avait su lui donner du plaisir, elle ne s’était pas détendue une seule seconde...

Silencieusement, il retira sa main pour l’observer. Déjà relevée, dos à lui, elle rassemblait un drap autour de son corps pour se protéger de son regard. Elle tremblait...

Se penchant sur le sol, elle ramassa sa chemise, qu’elle renfila simplement, puis sa robe, laissant à terre jupons, bas et autres fioritures.

Tournant la tête vers lui, esquissant un petit sourire tremblant, Melikha demanda :

- J’ai soif... Tout ça m’a...

Elle laissa sa phrase en suspens, incapable de lui trouver une fin. Ses lèvres rougies par ses baisers s’étirèrent dans un sourire qu’elle aurait voulu séduisant.

- Peut-être qu’on pourrait boire un verre ensemble ? reprit-elle hésitante, face au regard distant que posait sur elle le Roi.

Samael ne répondit rien, détaillant la jeune femme dont les mains peu assurées étaient enfouies dans les plis de sa robe. Il avait espéré que sa distraction lui suffirait pour lui faire oublier le but de sa venue. Mais visiblement non... C’était dommage. Melikha était belle, jeune, influençable... Elle avait toute une vie devant elle pour apprendre à devenir une grande dame, intelligente, subtile... Ou elle l’aurait eu si son mari n’avait pas décidé de se servir d’elle pour tenter de mettre fin aux jours du Roi.

Évidemment, tout le monde connaissait le goût qu’il avait pour les belles femmes et les plaisirs de la chair. Il n’était pas le premier à avoir essayé d’en profiter... Mais c’était se leurrer que croire que Samael ne protégeait pas ses arrières. Gwynvere, sa sœur, les assassins qui lui obéissaient corps et âmes, ses espions... Ils étaient bien trop efficaces pour qu’une tentative de ce genre passe à travers les mailles du filet. Il avait des yeux et des oreilles partout.

- Je ne crois pas que ce sera nécessaire, finit-il par murmurer en clignant doucement de ses longs cils noirs, posant sur elle un regard impénétrable.

Il aperçut la nuque de la belle trembler, imperceptiblement, alors qu’elle tentait un petit sourire interrogateur :

- Je ne comprends pas votre Majesté...

Elle était meilleure actrice qu’il ne le pensait jusque-là... Samael contracta les abdominaux pour s’asseoir sur le lit, levant la main pour caresser l’ovale du visage de son amante, et la courbe humide de ses lèvres.

- Lève-toi, chuchota-t-il en influant à sa voix une volonté de fer.

Avec un petit gémissement de surprise, Melikha se redressa sur ses jambes, portant sur Samael un regard effrayé. Celui qui lui renvoya était froid, dénué de sentiments.

- Dans l’ourlet de la manche de ta robe... Il y a une fiole... Prends-la.

La jeune femme gémit, et tenta de résister mais son esprit était trop faible, affaibli par la terreur et par le trouble.

- Non... S’il-vous plaît ! pleurnicha-t-elle alors que ses doigts extrayaient le flacon de son enveloppe de tissu.

La voix du roi prit une tendre inflexion, comme s’il était triste pour elle – et qui sait, peut-être était-ce le cas...

- Tu connais la loi Malikha...

- Ou-oui-ii, sanglota-t-elle en serrant l’objet contre sa paume.

Samael poussa un soupir affligé.

- Cite-la moi.

Les yeux clairs de la jeune femme étaient remplis de larme, alors qu’elle murmurait :

- « Toutes tentatives de régicide, régicide ou action mortelle à l’égard de quiconque appartenant à la famille royale seront punies par la peine de mort sans autre procès. »

Samael glissa hors du lit, venant prendre entre ses mains les épaules tremblantes de la jeune femme paralysée par la peur.

- Tu savais ce que tu faisais quand tu es venue ici avec cette fiole...

- Oui, soupira-t-elle en baissant la tête, sachant pertinemment l’inutilité d’un mensonge.

Samael releva son visage du bout de l’index, déposant sur ses lèvres délicates un doux baiser.

- Il est dommage que tu sois celle qui en paie le prix... Sois rassurée, ton mari subira le même sort...

Doucement, il baisa son front, les yeux fermés, pris de tendresse pour cette femme qui devrait perdre sa vie pour une erreur qui n’était pas vraiment la sienne. S’écartant d’un pas, il lui murmura, ignorant la supplique de son regard :

- Bois...

Certes son amante avait voulu le tuer. Même après avoir partagé son plaisir avec lui... Mais elle était si jeune... Peut-être quatre ans de moins que lui. Ses bras étaient fins, ses mains si lisses qu’elles n’avaient jamais dû subir aucun travaux... Il se sentait l’âme coupable, comme s’il mettait fin à la vie d’un oisillon sans défense.

Pourtant, il ne revint pas sur ses mots. La jeune femme, pâle comme la mort, avala d’une traite le contenu transparent. Les larmes débordèrent alors qu’elle tombait à genoux, face à lui, s’accrochant à ses jambes, le suppliant du regard de la sauver. Sa peau devint grise si vite qu’il apercevait le changement à vue d’œil. Sa main se perdit dans ses cheveux, et alors qu’elle suffoquait, il accompagna doucement son corps vers le sol.

Un poison fulgurant... En quelques secondes, il ne restait plus de la belle jeune femme qu’un corps mort, une peau craquelée et des yeux vides...

Dégoûté, Samael ramassa un drap qu’il jeta sur le cadavre. Parfois il se sentait comme un père contraint de punir un de ses enfants. Si seulement ils comprenaient qu'ils feraient mieux d'être sages...