Entraînement - [Louve - Morrigan]

Maintenant que la décision était prise de ce voyage à travers les royaumes, Morrigan devait remplir certaines obligations. Au moins, Louve l'accompagnait-elle et la jeune fille savait qu'elle pourrait compter sur elle pour rendre son voyage le plus sûr et le plus agréable possible. Mais voyager avec la maître d'armes impliquait également certaines contraintes. Rien d'insurmontable pour Morrigan, bien sûr, qui estimait que sa présence contrebalançait largement tous les inconvénients qu'il pourrait y avoir, mais c'était ce qui l'avait menée hors de sa Tour de bon matin pour respecter les instructions de Louve.

Un peu avant l'heure dite, la Duchesse de Curran, apparut dans la grande salle d'entraînement. Contrairement à ses habitudes, elle n'arborait pas de tissu précieux et éclatants, d'amples jupons et de bijoux étincelants. Puisqu'il s'agissait de s'entraîner "dans les conditions du voyage", elle avait choisi l'une des tenues qu'elle avait préparées pour son départ. Une jupe portefeuille de serge bleu nuit qui lui arrivait jusqu'aux chevilles ceignait ses hanches, fermée par un ruban qui faisait plusieurs tours autour de sa taille. L'avantage de ce bêtement était de ménager sa pudeur tout en étant assez ample pour lui permettre de courir ou de monter à cheval. Bien sûr, si elle bougeait trop, la gente pouvait laisser voir une jambe mais après tout, quelles étaient les chances pour qu'elle ait besoin de faire -ou plutôt de tenter- un de ces coups de pieds retournés que Louve avait toujours essayé de lui faire maîtriser ? En dessous de sa jupe, des bas de laine et une paire de bottes souples, fines et solides à la fois, surpiquées elles brillaient doucement et, vanité oblige, elles étaient pourvues du talon de quelques centimètres sans lequel elle parvenait à peine à marcher à présent.
Par dessus, elle portait aujourd'hui une robe brune largement ouverte au niveau de la fente de la jupe bleue. Elle avait fait tailler quelques jupe de cette coupe et autant de robes, basées sur le même modèle. Les couleurs en étaient variées et si la forme était globalement semblable, elle avait prévu un modèle en coton aérien et au manches de mousseline pour les régions chaudes, un autre dont le décolleté ne dévoilait pas la naissance de ses seins mais remontait au contraire jusqu'à son cou pour l'entourer d'un collier de douce fourrure, pour leurs étapes dans le nord. Une cape de voyage et une autre doublée de fourrure... Chaque pièce, était de la meilleure qualité, les matériaux étaient les plus précieux et de subtiles broderies typiques de l'Est ornaient chaque vêtement -et sous vêtements-.

Sa tenue était donc bien plus pratique que ce qu'elle portait au quotidien mais son évidente qualité trahissait le statut de celle qui la portait. Morrigan ne s'en souciait pas vraiment, cette qualité, elle y était habituée et la trouvait normale. Elle estimait avoir fait sa part du marché en venant ainsi, Amanna à sa ceinture, le cordon de la bague trouvée sur ses parents disparaissant entre ses seins et ses voluptueuses boucles noires retenues en un chignon sur le bas de sa nuque.
La jeune femme grimaça en tournant sur elle-même. Cet endroit ne lui rappelait pas les meilleurs souvenirs du monde : Louve savait se montrer exigeante et semblait attendre d'elle qu'elle soit tout à fait capable de se défendre. Par manque de talent en la matière ou simplement d'envie de maîtriser ce domaine, la duchesse n'avait jamais comblé les attentes de son amie. Il lui arrivait de s'en vouloir pour cela mais elle finissait en général à se convaincre qu'elle avait d'autres atouts que la force à sa disposition et que si ceux-ci ne suffisaient pas, elle pourrait toujours utiliser les rudiments de combat qu'elle maîtrisait. Et si vraiment cela ne fonctionnait pas, eh bien... Soyons francs : il serait temps de se demander si elle était vraiment destinée à survivre !
De toute manière, à présent, elle avait Louve, sa Louve adorée, qui ne laisserait personne la blesser si elle pouvait l'empêcher. Mais Morrigan elle-même était bien décidée à la protéger elle aussi ! Certes, ses interventions risquaient d'être bien moins épiques. Mais Morrigan ne manquait certainement pas de volonté.

En attendant l'heure, elle commença à s'échauffer par de lents étirements. Elle savait que c'était ce que Louve attendrait d'elle. Elle commença par quelques mouvements simples avant de compliquer les sollicitations de son corps habitué à l'oisiveté. Elle n'était peut-être pas très forte mais elle était souple et tandis qu'elle se penchait en avant, jambes tendues pour poser ses mains entre ses pieds, elle n'eut aucune peine à tenir la position, s'offrant même le luxe de basculer son poids sur ses mains avant de lancer une jambe en l'air, exécutant dans un gracieux envol de jupes, une roue parfaite qui la fit atterrir en grand écart sur le tapis de la salle d'entraînement.
Ses joues rougissaient sous l'effort délicieux, sa poitrine se soulevait dans son décolleté et un sourire béat étirait ses lèvres. Deux mèches sombres s'étaient échappées de son chignon pour encadrer son visage.

Avant de rejoindre Morrigan là où elle lui avait donné rendez-vous, Louve s'était rendue dans le quartier des soldats pour une visite impromptue et une évaluation surprise. Elle savait parfaitement qu'ils haïssaient ça, surtout de si bon matin, mais elle exigeait des hommes qu'elle entraînait une parfaite maîtrise du matin au soir et quelles que soient les conditions de vie ou le nombre de jours, semaines ou mois qu'elle s'était absentée.

Elle avait été désagréablement surprise de voir que personne ne surveillait leurs quartiers, tous les soldats étant endormis d'un profond sommeil. C'était sans pitié qu'elle avait fait carillonner le gond du réveil, les sortant tous du lit à quatre heures tapantes. Son but n'était pas de se faire aimer d'eux mais de les entraîner à surmonter les caprices du corps humain, et de maîtriser leurs corps, la force qu'ils contenaient et les armes qu'ils étaient capables de manipuler. Elle aurait pu tous les égorger dans leur sommeil, les uns après les autres si elle avait été un assassin issu de n'importe lequel des autres continents.

Durant une heure, Louve les fit courir, soulever des poids, dégouliner de transpiration malgré la relative fraîcheur à l'extérieur des enceintes du château. Pour une fois il ne pleuvait pas mais l'humidité de l'air collait à la peau. Les lames s'entrecroisaient, étincelantes, et elle repéra quelques nouvelles fines lames, un nouvel archer plutôt brillant, et quelques gars si discrets et habiles au poignard, kriss et autres armes furtives qu'elle se promit intérieurement d'en référer au maître des assassins pour les lier à leur guildes.

Quand elle les lâcha enfin, le soleil affleurait à peine à l'horizon, et Louve était certaine que les soldats la respectaient au moins autant qu'ils se désespéraient de sa présence. Encore fraîche malgré l'entraînement qu'elle avait partiellement suivi avec ses soldats, revêtue pour l'occasion d'une tenue de cuir fourrée et moulante qui faisait impudiquement l'étalage de ses formes, Louve traversa à grands pas le château pour être à l'heure dans la salle dans laquelle Morrigan et elle avaient l'habitude de s'entraîner quand ses parents étaient toujours là.

Il ne lui fallut que peu de temps pour arriver face aux doubles portes ouvrant sur la pièce décorée sobrement mais avec un goût certain. De multiples armes trônaient sur les murs, offrant un large choix aux combattants, alors que quelques agrès étaient disséminés ici et là pour les courageux gymnastes.

Morrigan quand à elle avait commencé son échauffement, puisque quand Louve arriva, elle eut droit à la délicieuse vision de ses jupes retroussées, avant que celles-ci ne retombe autour de les jambes de celle-ci, épanouies sur le sol, face à son grand écart époustouflant. Très joli. Très souple. Probablement un de ses seuls atouts en matière de combat.

Avec un petit sourire, Louve entra dans la pièce en étirant scrupuleusement chaque muscle de son dos. La tenue de sa protégée lui semblait encore trop froufroutante, elle aurait de loin trouvé plus pratique une combinaison comme la sienne, mais elle savait peine perdue l'idée de lui suggérer ce genre de vêtement...

Silencieusement, suivant l'exemple de sa protégée, elle allongea sa jambe droite sur une des barres qui courraient judicieusement le long d'un mur, avant de s'étendre un maximum dessus, étirant le moindre de ses muscles. Elle renouvela l'exemple avec sa deuxième jambe avant de glisser lentement en grand écart facial, inspirant régulièrement jusqu'à se plaquer complètement contre le sol.

Refermant les cuisses lentement, elle se maintint appuyée, le front contre ses jambes, avant de les écarter à nouveau, gardant une respiration profonde et régulière, les refermant derrière elle puis poussant sur ses mains pour étirer son dos au maximum.

Lorsqu'elle eut enfin fini ses étirements, Louve se releva, repoussant sa tresse sur le côté pour lui adresser un petit sourire.

- Bonjour...

Morrigan ne remarqua pas tout de suite l'arrivée de son amie. Elle continua de s'étirer un peu avant de finalement discerner la silhouette moulée de cuir qui bougeait sur le côté. A genoux sur les tapis, assise sur les talons de ses bottes, la jeune duchesse admira le corps délicieux de Louve, la maîtrise parfaite du moindre de ses gestes. Elle avait beau savoir qu'il ne s'agissait que de simples exercices d'échauffement, elle trouvait absolument magnifique, sensuelle même, la façon dont ses muscles se tendaient sous le cuir, dont sa longue natte blanche se balançait au rythme de ses mouvements.
Un peu rêveuse, elle cligna des yeux comme si elle se réveillait juste quand enfin la voix de la bannie résonna dans la pièce. Rougissant de s'être fait surprendre en flagrant délit d'admiration éhontée, Morrigan lui répondit d'une petite voix, un peu voilée.

- Bonjour...

Elle était partagée entre l'envie de lui rendre son sourire et celle de la gronder; entre le désir d'aller à sa rencontre et la volonté de rester où elle était pour attendre sagement ses instructions de maître d'arme. Il ne lui fallut évidemment qu'une seconde pour choisir de se relever, lissant ses jupes avant de glisser d'une démarches dansante vers Louve. Après ces longs mois séparées l'une de l'autre, elle ne pouvait tout simplement pas rester à distance. Morrigan se coula dans ses bras, fermant les yeux pour inspirer profondément son odeur.

- Tu ne m'as même pas dit que tu partais ce matin... Le lit était tout froid quand je me suis réveillée... bougonna-t-elle d'un ton accusateur.

En s'endormant, la veille, elle s'était sentie plus heureuse et plus en sécurité que jamais. Louve avait collé son corps contre le sien en sombrant dans le sommeil et sa chaleur s'était diffusée en elle comme l'eau imprègne un carré de tissu.
Quelle n'avait pas été sa surprise le lendemain à son réveil. Son lit, maintenant qu'elle y était seule lui avait paru désespérément vide et bien trop grand. Elle frissonnait et devait se raccrocher à ses couvertures. Sous les draps, sa main avait tâté le matelas et les oreillers mais la seule chaleur était la sienne. Si elle n'avait senti son parfum sauvage qui semblait imprégner toute la pièce, le moindre morceau de tissu et jusqu'à la masse sombre de ses cheveux, elle aurait pu croire qu'elle avait rêvé sa présence. Sa déception avait été cruelle et elle s'était demandé pendant un moment si elle avait fait une bêtise. Finalement elle avait décidé de faire comme si de rien n'était et de suivre les plans qu'elles avaient établis la veille.

Morrigan ne voyait pas vraiment l'intérêt de cet entraînement : ce n'était certainement pas maintenant qu'elle allait avoir une révélation et devenir une championne du combat ! Mais puisque Louve le lui avait demandé, elle comptait bien le faire pour elle. Evidemment, elle aurait préféré passer ce temps à parler, à savoir tout ce qui lui était arrivé à chaque seconde où elles avaient été séparées. Elle aurait aussi voulu discuter avec elle de leurs projets et de leur itinéraire.

Sans avoir conscience de la connotation tendancieuse de ses accusations, du genre de celle qu'on entend dans un couple, Morrigan continua en glissant ses bras autour de sa taille, nouant ses mains dans le creux de ses reins.

-J'aurais voulu me réveiller avec toi...

La jeune femme semblait dépourvu de la moindre inhibition, disant tout simplement tout ce qui lui passait par la tête. Louve lui avait tellement manquée, elle s'était sentie tellement seule pendant tout ce temps qu'elle ne voulait pas la quitter d'une semelle. Morrigan sentait tout contre le sien le corps de Louve, sa combinaison la moulant comme une deuxième peau. Sans la lâcher, elle s'éloigna un tout petit peu pour l'observer, son regard s'attardant un peu trop sur ses seins et ses hanches et ses cuisses. Avec une petite moue et un brusque rougissement de ses joues, elle déclara :

- Tu es sublime ainsi... Mais cette tenue ne laisse pas beaucoup de place à l'imagination. Tu vas vraiment voyager comme ça ? demanda-t-elle d'un ton qui se voulait nonchalant.

Louve esquissa un léger sourire en voyant Morrigan s'approcher d'elle et mouler son corps contre le sien avec un naturel confondant. Pas qu'elle ne lui ait jamais fait de câlin avant ça, mais les étreintes de ce genre n'étaient plus autant de mises depuis que la jeune femme avait atteint l'adolescence et à fortiori l'âge adulte. Pourtant, Louve ne se fit pas prier pour refermer ses bras sur elle, respirant à pleins poumons l'odeur de la jeune femme.

- Je ne voulais pas te réveiller, murmura-t-elle en déposant un baiser sur ses cheveux. Tu étais si profondément assoupie, que ç'aurait été un crime de te sortir de ton sommeil...

Avec un petit sourire taquin, elle lui chuchota à l'oreille :

- Tu étais étendue de tout ton long sur le lit, à moitié couchée sur moi, ta respiration était lente, profonde, et elle me chatouillait le cou... Tu as gémi dans ton sommeil, et ta chemise de nuit en dévoilait beaucoup plus que ce qu'elle aurait du pour ma santé mentale... Je me suis dit que me faufiler hors du lit pour faire partager ma bonne humeur à mes soldats était un bon plan. Et puis je savais que tu me retrouverais... Sans compter que nous allons avoir bientôt un certain nombre de nuits à passer ensemble et se réveiller ensemble. Il est fort possible que tu finisses même par en avoir marre de moi.

Sa bouche traîna quand même un peu sur le front de Morrigan, savourant quelque chose auquel elle n'avait pas eu droit depuis un certain temps. Ce genre d'étreinte, avec de la tendresse, elle n'en avait pas si souvent...

Jetant un regard à sa tenue - on ne peut plus basique - Louve lui lança un regard surpris. Elle était heureuse d'entendre de s abouche qu'elle était "sublime", mais un peu moins qu'elle critique sa tenue vestimentaire...

- C'est ma tenue habituelle oui... Je la décline en diverses couleurs, mais elle reste simple, pratique, confortable. Je peux grimper aux arbres avec ça. Et monter à cheval. Et me battre. Et obtenir une place dans une auberge pleine. Ce que tes vêtements, permet moi de douter, ne t'apporteront certainement pas... Est-ce que tu penses échapper à une bête sauvage avec tous ces jupons ?

Sa bouche vint taquiner sa pomette avec tendresse, et sa question, purement rhétorique, s'envola dans les airs.

- Prête à en découdre ? lui demanda-t-elle finalement avec un petit sourire qui aurait pu paraître pervers aux yeux d'un autre, mais qui était une simple anticipation amusée du moment à venir.

Morrigan ne répondit pas. Que ce soit pour les explications de Louve ou ses promesses de nuits passées ensemble, elle fit celle qui n'entendait rien, se contentant de rougir légèrement, de soupirer doucement sous ses lèvres. C'était Louve, la même Louve que dans son enfance, mais elle était tellement d'autres choses encore maintenant. Ces pertes immenses qu'elle avait subies en son absence illuminait d'un jour nouveau ses relations avec la Bannie. La perplexité se le disputait en elle à un sentiment d'excitation confus, qui lui devenait familier avec le retour de Louve au château.
Avec une petite moue vexée, elle baissa les yeux sur ses jupes, lissant le tissu. Certes elle n'était pas aussi pratique que celle de Louve, mais c'était ce qu'elle était prête à faire en guise de compromis. Louve avait beau dire, Morrigan appréciait moyennement que tout le monde puisse profiter du spectacle de ses fesses, de celui de sa poitrine, moulée comme par une seconde peau... Autant se peindre en noir ! C'aurait été aussi efficace pour ménager sa pudeur !

Car ceux qui regardait la Bannie, voyait certes la maître d'armes compétente, mais aussi une femme superbe. Et la duchesse ne pouvait que présumer que ceux qui la regardaient passer ne se contentait pas d'admirer sa force et sa compétence mais plutôt sa beauté et la souplesse de sa silhouette, du genre à inspirer des idées peu honnêtes.
Mais peut-être était-elle la seule à y voir un souci... Peut-être était-elle aussi la seule à vraiment se laisser distraire par les courbes de Louve. Non, ça, au moins elle était sûre que non.

Avec un petit soupir, elle rallia le centre de la salle. L'endroit ne lui rappelait pas que les meilleurs souvenirs du monde. Morrigan faisait toujours de son mieux bien sûr, mais vraiment, essayer de taper sur les gens ne lui paraissait pas la leçon la plus constructive du monde. De toute façon, pourquoi voudrait-on s'en prendre à elle ? Elle ne faisait de mal à personne et on ventait la façon dont elle gérait les affaires du duché.

- Aussi prête que je le serais jamais à un combat, répondit-elle sans grande conviction.

Pour reculer autant que possible le moment de se faire ridiculiser, ou gronder ou, très vraisemblablement meurtrir, la jeune femme jouait avec sa dague, la dégainant et la rengainant. Louve ne chercherait pas à la blesser pour le plaisir et Morrigan savait qu'elle ne pourrait s'en prendre qu'à son incompétence pour toutes les courbatures et ecchymoses dont elle hériterait. Quand jouer avec Amanna devint absolument ridicule, elle s'en prit au cordon de sa jupe du dessous.
Louve ne commencerait pas tant qu'elle ne ferait pas mine d'être en position, elle en était bien consciente. Bientôt elle dut bien se résoudre à adopter ce qui ressemblait à une posture de garde : les pieds fermement campés au sol, ses bras ramenés devant son visage et son abdomen et ses petits poings serrés.

- Sois douce, d'accord...? supplia-t-elle, redoutant la première chute.

Louve pouvait être la créature la plus douce qui soit mais quand il s'agissait de combat, fut-ce à l'entraînement, elle se montrait intransigeante. Mieux valait l'avoir à ses côtés que contre elle. Malheureusement, pour cet séance, c'était pour son bien que la bannie se plaçait comme son adversaire. Quel serait sa première consigne ? Ou allait-elle l'attaquer d'emblée ?

- Tu sais... Je ne sais pas si c'est une bonne idée en fait...

Louve ne l'avait pas entraînée depuis un certain temps et peut-être ne savait-elle pas ce que Morrigan avait pu constater avec horreur et dont elle n'avait parlé à personne. Dans les situations de stress, comme en mécanisme de défense, son don semblait réagir en échauffant les sens de ses adversaires. L'une des raisons -outre son peu de goûts pour la violence- pour lesquels elle délaissait quelque peu son entraînement. Peu des officiers de la garde de sa majesté appréciaient de voir soudain se retourner les uns contre les autres les participants des séances, les spectateurs attaquant les assaillants de la Duchesse lesquels défendaient jusqu'au sang celle qu'ils voyaient comme leur butin...

Mais la bannie n'accepterait aucune excuse alors, à quoi bon ?

Louve ne pouvait que sourire face aux sentiments que dispersait la jeune fille autour d'elle. Son désintérêt était tellement flagrant qu'elle avait presque elle-même envie de se poser au milieu de la salle pour exécuter quelques pas de danse plutôt que suivre le programme qu'elle leur avait imposées. Pourtant elle attendit patiemment, observant Morrigan du coin de l'oeil, le moment où elle se déciderait à rompre la monotonie de l'attente pour affronter la réalité de l'entraînement.

Si Louve n'avait pas cru absolument nécessaire de revoir les bases défensives de Morrigan - avant tout pour apaiser ses peurs à son égard - elle ne lui aurait jamais infligé quelque chose qui lui déplaisait si fortement... Ni n'aurait encouru le risque de meurtrir sa parfaite peau blanche.

Cependant, à l'encontre de ce qu'elle même pensait, Louve lui adressa un petit sourire plein de tendresse.

- Dis-toi que les meurtrissures que je pourrais t'infliger, je les apaiserais moi-même d'un massage à l'huile d'amande douce... Je m'en voudrais trop de t'avoir blessée...

La garde de la jeune femme manquait néanmoins de conviction. Un rouge-gorge se posant sur son poignet aurait pu faire plier son bras, à voir le peu de vigueur qui y résidait . S'approchant d'elle, Louve saisit fermement son poignet, lui faisant lâcher sa lame sans aucun effort.

- Un peu de conviction... Plus vite tu te concentreras, plus vite on aura fini.

Et elle récupéra la lame pour la lui remettre en main, fermant vigoureusement ses doigts autour du manche.

- Souviens-toi de ce que je t'ai appris... Prise souple mais ferme. Ton arme ne doit pas te glisser des doigts en plein combat. Si tu crains la lame, tu esquives, tu t'éloignes. Si tu présumes des mouvements de l'adversaire, tu plonges la lame dans l'abdomen et tu remontes. Peu importe où, tu infligeras des dégâts et tu agrandiras tes chances de t'en sortir vivante si je ne suis pas là.

Louve débitait sa leçon comme à n'importe qui d'autre, tentant de se faire à la fois ferme et douce. Pourtant, elle savait que si elle voulait que la jeune femme l'écoute, elle devait bien lui faire comprendre que tout ceci n'était pas une jeu, mais bien une manœuvre pour la garder en vie le plus longtemps possible...

Elle lui caressa la joue avec tendresse avant de revenir en arrière, saisir à son tour une arme de même acabit et l'attaquer sans plus attendre...